• Le Remake

    Un remake, qu'est-ce c'est ? Eh bien c'est très simple : de l'anglais « faire à nouveau », un remake désigne une nouvelle version d'une œuvre ou d'un texte, la reprise d'un sujet, d'un thème déjà traité. On l'utilise le plus souvent au cinéma bien que la littérature soit elle-même sujette à différents remakes.

    C'est un remake que nous vous proposons ici ! Vous pouvez prendre n'importe quoi de n'importe quelle époque, peu importe : votre objectif sera d'en faire une version décalée. Un genre opposé, de nouveaux détails, une nouvelle situation, d'autres personnages, que sais-je, tout est possible à condition que vous vous inspiriez de l’œuvre originale.

    De notre côté nous avons décidé de partir sur les dessins animés. En tant que binôme, notre but est de faire deviner à l'autre l’œuvre originale en disséminant dans notre textes des détails qui s'en rapportent. Le thème choisi – nous nous en donnons un – nous a porté vers l'érotisme.

    Je tiens à préciser que le texte suivant comporte des allusions sexuelles qui risquent de choquer certaines personnes. Malgré le fait que je le trouve très léger – vous n'y trouverez aucun terme et/ou expressions explicite – je tenais à vous prévenir.

    Bonne lecture, comme toujours, et bonne écriture !

    *

    La lumière fut ravalée par les ténèbres, percées des éclats de la lune.

    Stan quitta l’interrupteur du regard et tourna la tête.

    « Stan... Il faut que je te dise quelque chose... quelque chose de très important. »

    Elle était assise sur le rebord de son lit entre deux bosses de couverture, scrutait le plafond obscur avec intérêt. Sans doute imaginait-elle une infinité de vies dans le brouillard décharné qui y était imprimé, vies qu'elle eût certainement apprécié si ce problème ne l'avait pas empoisonnée.

    ― Marine... souffla-t-il.

    « Quoi ? Qu'est-ce qui se passe ? »

    Elle resta immobile quand il s'agenouilla devant elle, observant son visage fermé, ne fût-ce que pour attirer son regard perdu dans ce tourbillon d'existences impossibles. La perle saline qu'il recueillit sur la pulpe de son index avait déjà tracé un profond sillon rougeâtre sur sa joue. De son autre main, il attrapa le croquis que la jeune fille tenait sur ses genoux. Un éclair fugace éclaira les moindres tracés de la créature animale qui, paniquée, galopait dans une prairie d'éther et de papier, poursuivie par quelque horreur chimérique. Le flash céleste ne permit à Stan de visualiser les couleurs chatoyantes des flammes qui servaient de crinière à l'équidé.

    Il posa l'esquisse sur son bureau au-dessus d'un tas désordonné d'autres productions.

    De nombreux visages fantastiques lui sourirent.

    Sauf un.

    « Je... Je pars, Stan. Je pars, et je ne reviendrai pas.

    ― Qu-Quoi ?! P-Pourquoi ? Ils n'ont pas le droit ! »

    Il s'avança vers la fenêtre et n'y resta qu'une seconde ; cela lui suffit à mesurer l'ampleur de la tempête qui enflait au dehors, de la pluie qui martelait la vitre et qui renvoyait sa toile aqueuse sur le mur en face, du grondement qui fragmentait l'atmosphère et faisait trembler les fondations de l'immeuble, du vent qui, mugissant, faisait ployer les arbres et claquer les volets des voisins. Le ciel, lézardé de rigoles absolues, crachait de temps à autre une salve d'éclairs qui embrasaient le monde.

    Il se glissa aux côtés de Marine, blafarde, les épaules tressaillantes.

    Passa un bras autour de sa taille, colla son visage contre le sien.

    Elle bascula dans un sanglot.

    « C'est comme ça, Stan. Je ne peux rien y faire. »

    ― Je ne te laisserai pas partir ! Je ne vais pas rester les bras croisés ! »

    ― Je suis là, tout ira bien, murmura-t-il dans le creux de son oreille.

    Elle empoigna son tee-shirt et se coula sur ses genoux.

    ― Embrasse-moi.

    Elle avait la voix rauque, abîmée par les pleurs et le poids de la résignation.

    Stan n'éprouva pas la moindre gène. Il la gratifia d'un tendre sourire et, d'un geste aérien, passa son pouce sur le velouté froid de sa bouche humide.

    Leur regard se confondirent, l'un verdoyant, l'autre céruléen.

    Il se pencha à la conquête de son désir.

    « Je veux juste qu'on... qu'on se quitte comme si de rien n'était. Ni tristesse, ni peine. Ne... Ne rend pas la chose plus difficile, d'accord ? Mon cœur est déjà déchiré. Il n'en reste plus rien, quelques morceaux. S'il-te-plaît, s'il-te-plaît... »

    Ses mains caressaient le bas de son dos tout en remontant celui-ci sous la fibre de son débardeur jaune. Marine lui mordillait la lèvre, se délectant des saveurs qui peuplaient la cavité buccale du jeune homme ; d'une brusque ondulation du bassin, elle plaqua son buste contre le sien et dévala de ses paumes les muscles de son torse.

    Stan frissonna et, enhardi par la nouvelle chaleur baignant son corps, précipita ses gestes. Bientôt, un premier vêtement vint joncher le parquet de la petite chambre, vite recouvert d'un autre, plus masculin.

    Un éclair noya la scène le temps d'un soupir.

    « Non ! Je ne te laisserai pas partir, tu m'entends ! Je te retiendrai le temps qu'il faudra pour qu'ils comprennent que tu ne peux plus faire semblant. Je... je ne peux tout simplement pas te laisser. Pas maintenant. Je... Je ne peux pas. »

    Marine ôta l’élastique qui retenait depuis lors sa chevelure corail. Telle une vague safranée, ils vinrent recouvrir sa poitrine, accrochant la nuance diaphane de son teint et le bleu de ses yeux. Le nez enfoui au-dessus de cette dernière, Stan fut rapidement comblé des embruns iodés que portaient chacun des cheveux de la jeune fille. Elle apposa ses mains sur son crâne, farfouillant le dédale complexe de sa crinière foncée ; ses ongles s'enfoncèrent dans le velouté de sa peau basanée tandis qu'il déposait, au gré de ses baisers, d'innombrables marques humectées traçant une ligne exquise jusqu'au coin de son aisselle.

    Lorsqu'il leva la tête, il s'arrêta un instant sur ce visage majestueux dont les ombres avaient été ciselées par l'astre solitaire, emperlé des reflets de la pluie qui tambourinait le carré de lumière blafarde, encadré d'une écharpe de feu tranchée par le cobalt de ses iris. Son cœur pulsait d'une façon démentielle, comme si sa cage thoracique allait se déchirer ; la clameur qui montait en lui n'avait d'égal que le désir qui, crescendo, rythmait son pouls. Leitmotiv effréné, il était semblable à un orchestre de percussion battant une symphonie endiablée.

    Marine cueillit son menton et écrasa ses lèvres contre les siennes. Ce regard vert... il l'hypnotisait, illuminait son âme, était pour elle comme un soleil lascif duquel ne jaillissaient non pas des rayons mais des flèches de chaleur pure perforant sa conscience. Elle se rendait compte de ce qu'elle s'apprêtait à vivre, l'appréhendait à sa juste valeur, mais elle jugeait inutile de l'en empêcher, happée par cette bourrasque ardente.

    Un grondement envahit leur cœur.

    « Je sais, Stan, je sais. Mais tu n'y peux rien. Absolument rien. Ma liberté dépend d'eux, mais il y a plus important que mon propre bonheur. Les dettes nous rattrapent, nous devons les fuir. Je... je ne veux pas, Stan, je ne veux pas rester là. Je ne veux pas et je ne peux pas. »

    Stan ferma les yeux. Les tendons de ses doigts sculptèrent un instant ses avant-bras et, d'un revers, il jeta le soutient-gorge derrière lui. Déjà Marine le poussait à s'allonger au milieu du lit, plus sauvage que jamais ; elle avait ramené sa chevelure sur une épaule et, penchée en avant, se mouvait comme une onde pure. Ses seins accentuaient le galbe harmonieux de ses hanches et l'impression de volupté qu'elle dégageait, sa mine, farouche, traçait sur son visage de somptueux reliefs qui, mis en lumière par la foudre soudaine, la faisaient paraître déesse.

    Une lueur l'aveugla. Diffractant les faisceaux de la lune et les ombres de la pluie, une étoile de mer argentée pendait au-devant du sillon séparant la poitrine de Marine. En son cœur étincelait un rubis. La jeune femme capta la direction de ses yeux. Soudain immobile, elle fit un délicieux sourire. Elle porta le médaillon entre ses dents et, sensuelle, acheva son trajet jusqu'au pectoral de Stan.

    Il ne bougea pas.

    Une fissure électrique lézarda le ciel.

    « Tu... tu es sûre de toi ?

    ― Plus que jamais.

    ― Mais... Pourquoi ?

    ― Parce que je t'aime ! »

    Il ne s'autorisait aucun mouvement, la laissa reine de son propre corps. Elle immisça son index entre son caleçon et son pantalon, pinça ce dernier, le déboutonna. Le bout de ses doigts arpentèrent ses cuisses, ses genoux, ses mollets ; le vêtement resta comme en suspension dans l'air pendant que la lune photographiait la chambre, s'écrasant alors au milieu du désordre de livres, de dessins, et de jeux vidéos. Dans sa chute, l'une des jambières frôla le bureau et la masse d'ébauches qui l'ornaient. Un croquis s'envola, emporté par le fouet du tissu, roula sur lui-même, offrit son regard au chaos nocturne ainsi qu'à ceux dont les âmes se soudaient entre elles. Aucun des deux ne le vit, l'un étant trop concentré à se repaître de la chair de l'autre tandis que celui-ci semblait sur le point de se liquéfier.

    Le feuillet s'échoua sur un gros coussin émeraude posé au sol sur lequel gisait déjà une casquette bicolore à insigne verte. Le halo de la lune se déploya autour du petit être doré assis sur son train arrière, flanqué de minuscules pattes lui donnant l'apparence d'un rongeur merveilleux. Quand survint un énième éclair, la couleur ocre de son pelage se mit à briller.

    Ce fut son premier dessin, mais Stan l'oublia.

    Marine venait d'enlever les deux seuls habits qui dissimulaient les dernières parcelles de sa nudité.

    « Tu...

    ― Arrête de croire que ça me fais plaisir de devoir te quitter.

    ― Je ne l'ai jamais pensé !

    ― Alors pourquoi cherches-tu à vouloir me retenir ?

    ― Parce que je t'aime aussi, idiote ! »

    Il posa ses mains sur ses hanches, suivit leur houle dans l'obscurité tourmentée. Elle avait la tête rejetée en arrière dans un râle de plaisir ; ses gémissements, étouffés, lui permettaient de perpétuer les oscillations de ses reins. Ses cheveux de jais collaient à son front, son torse luisait de transpiration, son souffle était heurté, saccadé, sa bouche entrouverte. Il admira la fine pellicule de sueur qui glaçait le grain chaste de sa poitrine. Stan la recouvrit de ses paumes, apprécia les contrastes qui en accentuaient le galbe. Elle enserrait ses cuisses, remontait de temps en temps vers son intimité. Ses doigts s'envolèrent jusqu'à sa bouche, dégringolèrent le fleuve de sa ligne, survolèrent la liaison capiteuse qui décuplait leur amour pour enfin fouler les complexes reliefs de son ventre. Ses poignets grimpèrent son buste, s'accrochèrent à son cou, palpèrent les contours de son visage.

    Et sa bouche, d'un seul soupir charnel, vint à la rencontre de la sienne.

    Sans qu'il n'eût à un seul moment interrompu ses mouvements.

    Les filets de pluie noyaient la paroi floutée de la vitre et mesuraient le rythme de leur va-et-vient, comme le flux et reflux d'une langue de sel mourant sur une grève abandonnée. Ses souffles à elle en constituaient les tumultueuses brises imbibées des remugles marins, ses gestes à lui se rapportaient aux roulements du sable sous la force de l'eau. Leurs doigts étaient comme autant de mouettes s'envolant à la moindre perturbation du vent. Les sentiments qu'ils portaient chacun pour l'autre brillaient dans un ciel vierge de la moindre intempérie.

    Leur avenir.

    Cependant, au loin, un orage couvait.

    « Je suis désolée...

    ― Tu n'as pas à l'être. Je... Je veux juste que...

    ― Que ?

    ― Si tu pars loin de moi, je ne demanderai qu'une chose.

    ― Je t'écoute. »

    Stan inspira profondément. Blottie contre lui, Marine le regardait, l'observait, un doux sourire aux lèvres. Le bras passé sur son cou, les cheveux étalés en rosace autour de sa tête, elle avait l'air à la fois exténuée et comblée. Son corps brûlant disparaît sous les couvertures, ramassé le long de l'ample jambe du jeune homme.

    Il avait les yeux tournés vers le plafond de la chambre. Sculpté par les rafales lumineuses et

    animé de la projection de l'averse, il lui paraissait comme un résumé de la nuit qu'il venait de passer. Somptueuse, légère, surprenante. Complexe.

    ― Stan, lui souffla Marine.

    Il se tourna vers elle.

    Dans l'océan de ses yeux, il ne vit qu'une larme.

    ― Je ne t'oublierai jamais.

    « Que tu m'emmènes avec toi. »

    Plus tard, quand elle se fut endormie et qu'il fut seul confronté à lui-même, il entendit la pluie et les éclairs se lénifier. Le voile sur le pan du mur devint peu à peu inanimé.

    Le silence succéda la tempête.

    Incapable de s'endormir, il imagina alors une histoire dans laquelle Marine ne l'aurait jamais quitté et où elle ne le quitterait jamais. Une histoire où ils prendraient d'autres noms, endosseraient d'autres rôles, vivraient une autre vie. Une aventure sans fin jalonnée d'amour, de péripéties, et d'amitié.

    Un conte que peupleraient ses créations.

    Ses rêves.

    « C'est impossible. »

    Il ferma les yeux, bercé des soupirs de son cœur.

    D.B ~

    Avez-vous deviné de quel animé il s'agissait ?

     


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